La construction des murs de soutènement en pierre sèche est un savoir-faire séculaire. Cet assemblage de pierres de tous calibres, sans liant, assure une fonction drainante et favorise la biodiversité végétale et animale. Grâce à son savoir-faire, Benoît Gauthier contribue à la préservation de ces ouvrages faisant partie intégrante de son patrimoine local.
Les murs de soutènement ont façonné des paysages régionaux et ont permis la création de terres exploitables (agriculture, viniculture…), là où la géologie abrupte ne l’autorisait pas. Benoît Gauthier, spécialiste de la pierre sèche et docteur en géologie, réalise, crée et restaure, entre autres, ce type d’ouvrage dans sa région, la vallée du Rhône, frontière naturelle entre l’Ardèche et la Drôme.
Des pierres appropriées
Dans les constructions en pierre sèche, la nature de la pierre dépend
de la géologie du sol. Selon les règles professionnelles, un mur de soutènement peut être composé de granit, gneiss, schiste, calcaire, grès basalte, lave, marbre, etc., dès lors que la pierre dispose d’une résistance mécanique appropriée. Pour cela, elles doivent répondre à la norme NF B 10-601 pierres naturelles issues de carrières et aux prescriptions générales d’emploi. Le rôle d’un mur de soutènement consiste ainsi à maintenir un terrain dans une zone pentue tout en évitant son érosion par le ruissellement de l’eau. En respectant l’agencement des pierres et grâce à sa masse, l’ouvrage résiste ainsi dans le temps à la poussée d’un terrain qu’il soutient.
Un « fruit » indispensable
Les murs de soutènement ne sont pas qu’un simple empilage de pierres. Si ce type de construction était jadis édifié de façon empirique, il a vu sa technique évoluer au fil des siècles, et elle fait désormais l’objet de règles professionnelles.
Par exemple, pour qu’il résiste à la poussée naturelle du sol, plus un mur est haut et plus son parement (façade) doit être incliné et sa base plus épaisse que son sommet. Benoît Gauthier, qui exploite du granit ardéchois (pierre locale), veille ainsi à respecter le fruit, terme définissant l’aplomb incliné vers l’arrière de la façade du mur (parement) ainsi que la différence d’épaisseur entre le socle et le sommet (plus étroit), la poussée d’un terrain étant naturellement plus importante à la base du mur.
Selon la hauteur de l’ouvrage, l’artisan réalise les fruits les plus courants. Ceux-ci variant de 5 % à 25 %, mais ils peuvent être inférieurs à 5 % pour un mur de moins d’un mètre de haut par exemple.
Un contre-mur en éventail
Pour augmenter la résistance du mur à la poussée du sol et dans le respect des règles professionnelles, l’artisan dispose la fondation (socle) avec un angle opposé au fruit de 90° (angle suivant l’inclinaison du fruit). Il empile ensuite les pierres du contre-mur en suivant l’inclinaison du socle qu’il redresse progressivement à l’horizontale jusqu’au deux tiers de l’ouvrage. Puis, il achève le montage jusqu’au sommet en inclinant les pierres vers l’intérieur du parement (inclinaison opposée au fruit de l’ordre de 45°) pour une résistance accrue de l’ouvrage. La forme d’un éventail permet de visualiser plus concrètement l’inclinaison des pierres du contre-mur, du socle au sommet. Enfin, Benoît Gauthier achève son ouvrage par le couronnement, pierres posées au faîte du mur stabilisées par leur propre poids.
Thomas Peixoto